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D’une chute à l’autre, en quête de salut


Le sermon sur la chute de Rome, Jérôme Ferrari, Paris : Thélème, 2013. 5 h. (lu par Pierre-François Garel), 21 € Au coeur des ténèbres, Joseph Conrad, Paris : Thélème, 2008, 3 h. (lu par Denis Lavant), 27 €

J’ai toujours eu pour principe, dans mes coups de coeur, de n’écrire, justement, que des “coups de coeur”. Ne pas aimer ne rend pas toujours intelligent, et la place dans les journaux, pour la critique littéraire, est si parcimonieusement comptée qu’il vaut mieux la consacrer entièrement à faire aimer. Mais voilà, Victoire a fermé ses colonnes à la critique littéraire et je me trouve face à un cas particulier : j’ai écouté jusqu’au bout un roman que j’aurais, en lecture personnelle, refermé après 10 pages. Il s’agit du Prix Goncourt 2012, le très salué “Sermon sur la chute de Rome” de Ferrari. Je n’ai rien aimé dans ce roman : la gratuité de la construction, les effets de style qui se font sentir et que l’auteur appuie pour faire remarquer combien il écrit bien, les facilités de construction, et surtout le gaspillage d’une idée formidable : faire le lien entre Saint Augustin et la fin de l’empire romain d’une part et notre époque que l’on dit elle aussi de fin. Mais l’apocalypse fait florès, tout le monde en parle, et il aurait fallu plus d’originalité que ce parallèle assez cliché entre Augustin et deux gamins ouvrant un bistrot en Corse.

Bref. Je l’ai quand même écouté jusqu’au bout. Je dis bien “écouté”, pas lu ; grâce à la très belle réalisation des éditions Thélème, un livre audio lu par Pierre-François Garel.

Et dans la foulée, j’ai mis dans le lecteur de ma voiture un autre livre audio des mêmes éditions.

Là, un chef-d’oeuvre absolu de la littérature (un de mes 5 romans préférés), Au coeur des ténèbres de Joseph Conrad, magnifiquement lu par Denis Lavant (je regrette juste une captation un peu froide). Là, on est dans la chute d’un empire, et même d’un monde, plongé dans des âmes autrement complexes (et donc universelles), dans un style époustouflant où toutes les images sont justes et puissantes, où pas une virgule n’est gratuite. Il faut (re)lire ce roman, ne serait-ce que pour cette description impitoyable de Bruxelles, cette ville de “sépulcres blanchis”, d’où se trame, derrière de pesants bureaux, une des pires pages de l’inhumanité : la colonisation et l’exploitation du Congo.

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