Murambi, le livre des ossements, Boubacar Boris Diop, Paris : Zulma, 2011. 269 p. 18 €
Depuis Auschwitz, se pose de manière particulièrement aiguë la question de la relation entre la littérature et les pires drames. Peut-on en faire des fictions et, si oui, quelles conditions ? Dans le cas du génocide rwandais, la réponse à la première question est affirmative, et même plus : des écrivains africains ont été invités en résidence pour écrire un roman sur le drame de 1994. Diop fut l’un d’eux. Venu du Sénégal, riche des dizaines de témoignages recueillis sur les lieux, il a conçu un roman qui dépeint, avec puissance et justesse, l’infinie complexité du mal, jusque dans son effroyable banalité, telle que l’avait déjà analysée Arendt. Les ossements de Murambi disent aux survivants qu’il n’y a pas de réelles distinctions ethniques, permettant de justifier un génocide. Le racisme est un prétexte qui sert les plus basses aspirations et qui réveille l’animal en nous. Un roman très dur, certes, mais salutaire, indispensable comme le sont les romans qui disent l’humanité.
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