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Zaventem, morne débat…

Dans le tumulte « campagnard » créé autour de la question du survol de Bruxelles, il y a des silences assourdissants et des trous de mémoire chez des personnes qui ne manquent pas d’air… J’entendais ce matin sur la Première Guy Vanhengel, au nom bien sympathique, dire tout bonnement qu’il suffisait d’en revenir à la situation d’avant février, pour laquelle personne ne se plaignait. C’est oublier que depuis le plan Anciaux, de sinistre mémoire, le Brabant wallon a subi des survols intensifs sur une part significative de son territoire, qui jusque-là n’en avait jamais subi, sauf à de très rares occasions climatiques. Mais Guy Vanhengel a raison sur un point : ces populations – des zones très densément habitées aussi – font moins de bruit que les Bruxellois, qui ont la chance d’être soutenus unanimement par les politiques, surtout en campagne électorale.

Comprenons-nous bien ; il ne s’agit pas de jouer au NIMBY et de laisser les Brabançons profiter du malheur bruxellois. Mais avant tout, il convient de faire un bref rappel de certains éléments clés pour comprendre le dossier pourri des nuisances aériennes créées par l’aéroport de Bruxelles-National, qui n’a plus rien de national.

Tout d’abord, rappelons que c’est un héritage de l’occupant nazi, lequel avait installé là un aéroport militaire, repris ensuite et développé en aéroport civil. Ensuite, que cet aéroport a grandi au fur et à mesure que croissait le transport aérien. Les zones survolées, principalement en Flandre, n’étaient pas loties, et pour cause. Mais il s’est trouvé des (ir)responsables pour déclarer ces zones aptes à la construction, lesquels terrains ont été vendus à bas prix étant donné les nuisances. Des gens s’y sont installés.  Puis ont fait pression sur leurs responsables politiques (flamands) pour réduire les nuisances. Ce que ces responsables , en quête de voix terrestres et peu soucieux des voies aériennes, se sont empressés de faire. Ajoutons à cela le « coup de génie » ultralibéral qui a vendu « notre » aéroport national à des Australiens, une société privée donc, qui se soucie moins des nuisances aux riverains que du bien-être des kangourous et, surtout, de la rentabilité de ses investissements.

Résultat de ce cocktail sulfureux : la « dispersion » des vols sur la Wallonie et un accroissement incontrôlable d’un aéroport qui, pour des raisons évidentes de localisation, n’aurait jamais dû grandir de la sorte.

Un autre élément politique rentre en ligne de compte : les zones du Brabant survolées abritent un électorat majoritairement MR. Le PS, majoritaire dans le reste de la Région, ne va donc pas se battre pour eux. Jean-Claude Vancauwenberghe, que j’avais rencontré à l’époque pour ce dossier, m’avait expliqué sans détour que le gouvernement wallon n’allait rien faire. Raison invoquée ? Il ne voulait pas que les Flamands bloquent le développement de l’aéroport de Liège, donc il fallait les laisser développer Zaventem. Inutile de dire que les Flamands ne se sont pas gênés pour se plaindre des nuisances liées au développement de Liege Airport.

Si on abroge le plan Wathelet pour revenir à la situation qui prévalait avant son application, ce sera purement et simplement le retour des nuisances principales sur le Brabant, sans épargner pour autant Bruxelles et la Flandre. C’est la méthode du marteau sur la tête : ça fait du bien quand ça s’arrête. Les Bruxellois seront peut-être soulagés d’être moins survolés, mais ils le seront toujours, et de manière excessive et dangereuse. Mais ce qui est sûr, c’est qu’on n’entendra plus grand-chose : le CDH engrangera un succès sur Bruxelles, le MR ne s’opposera pas au développement d’un fleuron économique et de l’outil symbole de la croissance et de la liberté (de consommer), et le PS ne bougera pas le petit doigt pour des électeurs de Reynders.

Une solution pourrait être que notre monde change et que les gens décident de ne plus prendre l’avion, ou du moins de réduire leurs voyages. Ne rêvons pas…

Une autre solution serait de bloquer le développement de l’aéroport, voire de réduire drastiquement son utilisation pour en faire ce que, géographiquement, il doit être : un aéroport régional, bien connecté par des réseaux ferrés aux grands aéroports voisins des Pays-Bas, de France et d’Allemagne. Mais comme l’État n’a plus grand-chose à dire dans une société privée de droit australien… Ne rêvons toujours pas.

Troisième solution (continuons dans l’utopie) : déplacer Brussels Airport dans les forêts ardennaises. Excellent sujet pour le prochain poisson d’avril.

Autrement dit, il n’y a pas de solution correcte, juste et équilibrée. Zaventem cristallise tous les défauts de notre pays (qui a par ailleurs pas mal de qualités) : un communautarisme étroit et électoraliste, un ultralibéralisme qui ôte aux pouvoirs publics le contrôle des équipements publics, et une guéguerre politico-politicienne au sein des partis francophones. Il y a des jours où le moral prend un coup dans l’aile…

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