Les Angéliques
13 juillet 1788 : un terrible orage secoue la France du Sud au Nord, semant la désolation dans un pays déjà éprouvé par la sécheresse, la famine et les incuries de la Cour. Au fond d’un val perdu, le tyrannique vicomte Baptiste de Ruspin, châtelain de la Follye, tue l’un de ses paysans. Son fils Népomucène, jeune homme éclairé, nourri de la lecture des Philosophes, saisit aussitôt ce prétexte pour l’arrêter et mettre en place la société démocratique à laquelle il aspire. Entouré d’Agnès, sa tendre épouse, et de quelques amis sûrs, il proclame, le 14 juillet 1788, la République d’Avau.
Mais il est difficile de donner aux hommes ce qu’ils ne peuvent ou ne veulent recevoir. Il ne suffit pas de proclamer « Liberté, égalité et frugalité » pour changer en citoyens de braves paysans dressés à l’obéissance aveugle. Sans compter les rivalités intestines, les trahisons, sans compter les maris déshonorés, les femmes bafouées, les enfants enlevés – l’ordinaire d’une société qui vit en cercle fermé, avilissant chaque jour un peu plus des esprits pourtant gagnés à l’idéal républicain.
Durant cinq ans, sous l’œil méprisant de son père emprisonné, Népomucène se bat contre tous, jusqu’à ce que la France républicaine redécouvre cette Follye isolée dans sa vallée, et la reprenne sous son aile froide et sanglante…
Que reste-t-il de la révolte quand l’Histoire la fait Révolution ? Que reste-t-il des hommes éclairés, quand leurs ambitions et leurs intérêts s’affrontent ? Que reste-t-il des femmes, soucieuses de préserver l’essentiel, quand « les beaux rêves font les vies tristes » ? Cette utopie, qui manifeste avant l’heure les espoirs et les errements de la Révolution de 1789, est aussi une histoire de haine entre un père et son fils, entre un aristocrate de l’Ancien Régime, adepte de Machiavel, et un jeune homme visionnaire autant qu’artisan du drame qui ensanglantera le pays d’Avau.
Dans les romans italiens du Monde d'Asmodée Edern, deux Morgan jouent un rôle important : Sébastien le photographe, et Baptiste l'écrivain. Quand ce monde a commencé à se structurer dans mon esprit, j'ai voulu offrir à cette famille des racines historiques comparables à celles des familles toscanes ou vénitiennes.
Avau répond en sombre à Montechiarro ; la France d'un côté, l'Italie de l'autre. Et au départ de tous ces romans, une révolution et ses errements.
Au départ, ce roman comportait deux parties : à cette première partie des Angéliques – récit d’un projet utopique et collectif – devait succéder l’évocation des Diaboliques, deux générations plus tard – récit d’une vengeance individuelle. Mais à l’époque, Claude Durand (le directeur des éditions Fayard) avait préféré scinder les deux, de peur de décontenancer le lecteur. Je pensais intégrer ces « Diaboliques » dans un Décaméron qui n’a jamais vu le jour (mais qui fut pourtant